2 nov. 2009

A propos des éditions Anathème

interview en français avec une journaliste coréenne (questions non retouchées...)

Dans la raison de binding des livre, tu veux dire que t'as pas beaucoup de d'argent, ce papier n'est pas très cher, mais impossible imprimer à deux côté, alors t'a pris ce manière, plier le papier, que t'as vu pendant ton voyage en Asie. c'est ça?

Pour le "binding" (façonnage), j'ai choisi d'avoir ce système de pliure pour retrouver un aspect de livre 'à l'asiatique'. C'était un choix esthétique lié à la sensation telle que je l'avais ressentie face à ce genre d'ouvrages: du vide entre les pages, une chasse vers la tranche (que j'ai essayé de mettre en valeur par l'utilisation de cabochons imprimés dans le pli). Mais je n'avais pas une idée très précise de ce que serait le résultat. J'avais travaillé sur des prototypes qui me convenaient mais je n'ai su qu'au dernier moment si cela marcherait, puisque l'étape du façonnage est la toute dernière dans la chaîne de fabrication du livre.

Au niveau de la production, j'ai d'abord travaillé à la résolution de ce 'détail' de façonnage, car il fallait que j'arrive à l'intégrer à un système de production standard actuel pour qu'il n'y ait pas de surcoût. Les livres façonnés ainsi en asie étaient imprimés au 'bento', avec la paume de la main, sur de longues feuilles de papier qui sont ensuite pliées en accordéon et reliées. Je ne pouvais évidemment pas procéder de la même manière. J'ai travaillé environ deux mois avec le façonnier et l'imprimeur pour mettre au point une solution, qui impliquerait au final que je livre à l'imprimeur les feuilles imposées (au format des plaques d'impression) plutôt qu'une maquette sur un logiciel de mise en page.


Et tu m'as dit que tu as travaillé dans un atelier de lithographie, et j'ai vu beaucoup de livres de bd par lithographie à Fanzinotheque à Poitier et j'ai vu un livre de Pierre par lithographie aussi. En fait j'étais un peu étonnée parce que je pensais que lithographie est très difficile et une façon de fine art mais ici, j'ai une impression que vous utilisez assez souvent tant qu'un manière pour publier.

Le livre de Pierre, 'Chasseur', est un magnifique livre. C'est de la sérigraphie, il a été édité par Audrey Abraham qui prépare un autre livre avec Goulven Derrien. On utilise souvent la sérigraphie, la lithographie, la lino-gravure et surtout la photocopie pour réaliser tous types d'éditions. Je crois que le fanzine et la photocopie sont très liés au mouvement punk en France dans les années 70, et d'une manière générale la sérigraphie était le médium principal d'impression des affiches de mai 68. Ce sont des moyens de reproduction à bas prix qui accompagnent les arts de rue. Sinon la sérigraphie et la gravure ont été aussi repris à la fin du 19ème par les impressionnistes, les 'refusés' de l'art académique, et dans une période où on découvrait en France les estampes japonaises.

Pour la sérigraphie aujourd'hui tu peux citer le catalogue du 'Dernier Cri', c'est un très bon exemple de politique éditoriale rattachée à une démarche et à un type de technique de production.

Par rapport à ce qui se fait ou non, il faut que tu te dises qu'il y a pour chaque éditeur une volonté d'avoir une particularité éditoriale propre à la maison. C'est très français, chacun veut faire son petit style de travaux, on aime bien baser notre travail sur une réflexion théorique ou bien sur un processus créatif particulier. Ainsi, chaque maison d'édition prétend à sa propre politique éditoriale, avec plus ou moins de réussite. Il n'y a pas franchement de généralités.


Et puis... le head band sur le couverture, c'était pour garder l'image, mais on a besoin les textes de titre, nom d'auteur..etc, alors tu a utilisé cette chose, j'ai bien compris?


J'ai utilisé le bandeau comme partie indissociable de la couverture, avec du trait (du dessin) seulement sur l'ensemble de la couverture et des rabats, et tous les éléments texte sur le rabat (titre...etc). Mais nous avons un peu dérogé à la règle selon ce que me proposaient les auteurs. Mais nous avions ce système comme base de départ.


Les livres:

Isao, dans Armany Jeans, propose une succession d'histoire de une page, qui introduisent chaque fois une nouvelle situation, de nouveaux personnages; un aspect important est qu'il travaille en improvisation, c'est à dire sans scénario ni crayonné. Chaque page est composée de six cases, une sorte de damier dont il se sert comme cadre pour cette improvisation.
Je t'avais parlé de haïkus car les dialogues, et les personnages apparaissent au fil de son écriture, et qu'on se retrouve à la lecture extrêmement proche de la manière dont il a travaillé, en plus d'entrer dans son univers.


Dumbowl
de Joseph est un travail qu'il qualifie lui-même de comics, des histoires de une à quatre pages formant de petits épisodes dans un univers surréaliste et lyrique. En même temps, plusieurs personnages grotesques rappellent des situation de la vie courante, transposées dans un lieu désertique. Dumb owl pour moi c'est un grand désert habité.


Enfin Pierre a travaillé dans des carnets. L'enjeu pour son livre était que nous devions partir de son rapport très intime avec son travail. J'ai dû dans un premier temps comprendre la façon dont il travaillait sur ce projet pour être en mesure de lui proposer des essais dans la bonne direction. Dès le départ nous savions que nous allions travailler sur autre chose, que son travail allait devenir autre chose sous cette forme. Mais j'ai beaucoup aimé cette idée puisque j'avais conçu le format pour qu'il puisse accepter ce type de travail;

On a donc fait des essais et cela a donné par grand vent, qui est une bande dessinée, de notre point de vue. C'est une suite d'images qui fonctionnent dans la continuité ou, selon comment on décide de les lire. Cela se passe à la campagne, et le propos de Pierre est dans la manière même qu'il a de dessiner: ses images sont constituées d'accumulations de strates, de couches, et il recolle en permanence plein de petits bouts de papier pour composer une image. Ce sont des images 'bruyantes', il y a une vibration permanente. Cela convenait à mon envie de mettre en avant le trait de l'auteur (dans la ligne éditoriale) et c'est ce qui a influencé le choix de photogravure, qui consistait à conserver la matière du fond du carnet. Pour autant la forme du carnet ouvert se voit moins que l'image en elle-même, et c'était aussi un choix. Enfin, le livre se lit dans l'épaisseur, et cela renvoie à se façon de travailler dans ses carnets. Bref un livre réussi.

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